samedi 16 juillet 2011

Was I right to leave?




















She dreams in color, she dreams in red
Can't find a better man.

 Pearl Jam - Better Man





J'ai vu tellement de salles d'attente et de cabinets de consultation ces derniers mois que j'ai bien envie d'écrire un guide.  Genre mes meilleures adresses, les choses à éviter, la relation avec médecin. Dans un premier temps, un ou deux posts suffiront.

D'abord, distinguer le public du privé.

Chez un médecin privé, on est souvent reçu à la maison, comme les potes. Sauf qu'on est généralement accueilli par une secrétaire. On entre et c'est bien cosy, papier peint qui me rappelle le mercredi chez mes grands-parents (un subtil camaïeu d'orange et de brun : 50's are not so dead), tentures bien épaisses datant probablement de l'année où le praticien a eu son doctorat (s'il l'a bien eu, pour certains j'ai quand même eu des doutes). Les meubles sont aussi sombres que mes pensées au moment où j'effleure leur patine, le chêne sert peut-être à dire qu'ici c'est du sérieux, pas comme chez ces sauvageons des hôpitaux universitaires. Les affiches d'info-santé ne sont même plus déprimantes : quand je vois les "Vous sentez cette douleur? C'est probablement un CANCER", ça me fait plutôt penser aux news gentiment alarmistes de la Fox. Je m'assieds donc au ralenti à ce moment-là, les yeux rivés sur les photos de mannequins d'un jour à la peau parsemée de fleurs de cimetière, s'évertuant à enseigner au patient la posture à adopter dans diverses situations, dont souvent : en promenade avec les petits-enfants, au golf, au backgammon. Si j'avais déjà des doutes quant à ma naissance bien trop tardive, j'en ai là la confirmation. Les revues sont de type Paris Match et Gala, car à 50€ la séance, le public-cible est plutôt aisé, âgé, doté d'un intérêt certain pour le rapt de Charlène par Albert et l'installation d'un Stannah. Je me retiens souvent de subtiliser un "Nous Deux", par respect pour mon (vieux) prochain.  Les regards (dussé-je dire les cataractes? Non hein, ça ira comme ça.) sont généralement rivés sur mes baskets ou les morceaux de métal incrustés dans ma peau mais se détournent bien vite, avec un demi-sourire, quand je les croise. Le silence est pesant, à peine masqué par une compil' de classique, les toussotements s'enchaînent. Le maître de cérémonie entre alors, en blouse blanche, lunetté, grisonnant à souhait. L'image du patriarche, universitaire de surcroît. La poignée de main est comme ailleurs révélatrice, voire déterminante pour la suite de la relation. Je ne sais pas si c'est à ce moment-là que je merde, ou si c'est plutôt quand je soupire après la fatale question "et donc qu'est-ce qui vous amène?":

- "11 ans." => trop pesant
- "11 ans de douleurs" => trop "Les Misérables", et allez, entre nous, qui crois-je duper?
- "en fait les anti-douleur/inflammatoires ne marchent pas" => pas de problème, je ressortirai sans avoir avancé d'un pas mais dans mon sac seront bien sagement pliées 3 ordonnances, "juste au cas où ça ne serait pas efficace mais j'en doute"
- et je ne continue pas.

Une des possibles raisons de mon insuccès auprès de la caducée peut également être mon manque de répartie face à des questions ou assertions purement dégueulasses/discriminantes/pleines de préjugés quant à mon âge :

- vous fumez?
- non.
- ah vraiment?? (rictus moqueur)

- vous buvez?
- euh la dernière fois c'était il y a 6 mois
- oui, donc régulièrement.

Et j'en passe. Parce que celui-là m'énerve encore trop et que j'ai envie de lui écrire une lettre, voire pire : de le dénoncer à Ciné-Télé Revue.

Pour conclure, ce qui me fascine, et ce particulièrement chez les médecins privés, c'est cette facilité à détourner la conversation de ma question première, à savoir : "pourquoi vous ne trouvez pas ce que j'ai?" ou "pourquoi aucun traitement ne marche?". A ce moment, je ne sais même plus ce qu'ils peuvent me raconter, blabla c'est trop profond, c'est vraiment curieux mais c'est possible, on verra à la prochaine séance. J'ai surtout l'impression que le privé cherche davantage à fidéliser le chaland que son homologue publique, qui, nous le verrons, est plutôt porté sur l'outsourcing ou ordonnance pour examens médicaux à outrance. Pour les premiers, il doit s'agir d'une question de résidence secondaire à la Baule à entretenir probablement. 

Prochain post sur la pugnacité (pas forcément plus payante) du secteur hospitalier, donc.


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