lundi 27 avril 2009

Burn your fingers one by one.






















You've got a great car,
Yeah, what's wrong with it today?
The Dandy Warhols - Bohemian like you




Si jamais l'idée me venait de comparer ma condition actuelle à celle, à tout hasard, d'il y a trois ans, je dirais que j'ai principalement passé le temps à jouer à Jenga. Aussi à apprendre des trucs, à débusquer de nouveaux animaux bizarres, à serrer les mâchoires, à concevoir l'inconcevable, à en attendre moins de la médecine, à en attendre moins..., à goûter, à rencontrer des gens hétéroclites, à lire entre plein de lignes en même temps, à entrevoir les limites du web 2.0, à affiner ma technique de cuisson du thon rouge, à franchir des frontières, à penser du bien du streaming, à revoir ma conception du bien et du mal et à découvrir de nouvelles chansons étranges. Mais quand même, surtout à jouer à Jenga.

Mais bien.

Au début, des pièces se sont échappées, les unes après les autres, sans trop se faire remarquer. Un vide par-ci, un peu d'instabilité par-là : on retient sa respiration mais on ôte une autre pièce tant bien que mal, tout en lançant un regard plein de fausse assurance à la ronde, qui retient sa respiration aussi mais pas pour les mêmes raisons. C'est le jeu.

Mais jusqu'ici, ça tenait.

Le problème est que lorsque l'on retire trop de ce qui fait la fondation, le vertige s'accentue, la précarité et le doute s'installent...le point de non-retour est proche. Il y a d'ailleurs un moment où ça tangue tellement qu'on a envie de foutre une baffe à la tour chancelante pour qu'elle s'effondre plus vite, histoire d'abréger.

Tellement l'attente est insoutenable.
Tellement ça ne vaut plus le coup de jouer .
MB avait pourtant prévenu au dos de la boîte qu'on pouvait perdre à ce jeu, mais tout de même, la chute est rude.

Ce moment-là est sans doute le plus détestable, celui qui vaut le moins la peine dans le jeu : celui où généralement, le gamin joueur fronce les sourcils, sent son pouls s'accélérer et voit le mot "perdu" clignoter sur sa rétine.

L'autre issue est donc de récupérer des pièces qui ressemblent à celles du Jenga mais qui n'en sont pas. Sinon ça ne serait pas honnête. Tout ça pour boucher les trous, pour "reconstruire" même si on sait que c'est un mensonge et que la tour ne ressemblera plus jamais à celle promise dans la pub.
Probablement pour un mieux, certainement pour un changement.

Je vais donc partir à la recherche de pièces-placebos et si ça ne tient pas, un bon coup de chatterton et il n'y paraîtra plus. Au pire, il restera toujours Jenga Xtreme, histoire de pouvoir marier incertitude ET vert fluo.


Et plus je prends conscience de ce qui est écrit sur ce blog, plus je me dis que ma haine du jeu est profitable à autrui.


mardi 21 avril 2009

A city wall and a trampoline.
















Say "yes"...
At least say "hello".
Metallica - The Memory Remains



Un jour, y'a pas si longtemps que ça, on m'a dit que je parlais trop. Cette phrase anodine a eu pour effet une mutation en 4 temps :

1) J'ai commencé à écrire trop. Les mots ne voulaient pas* s'arrêter de couler. C'est con que ça ne se traduise pas par des couches sur la plume de mon Watterman (oui j'y tiens, f*ck Parker), sinon j'aurais pu la décortiquer comme le tronc d'un vieux chêne et compter les mots comme on compte les années. J'aurais ensuite pu en faire un tableau Excel, afin d'ainsi corréler mois, saisons et humeur avec les mots. Mais alors il aurait fallu utiliser Access pour une efficience accrue, donc finalement c'est bien que les couches restent sur les troncs et dans ma tête**.

2) Ecrire c'est bien. Mais quand mes mains ne tiennent aucun stylo ni ne frappent compulsivement des touches, il a bien fallu trouver une digue réelle à ces débordements locutifs occasionnels. C'est à cette occasion que j'ai appris à enchaîner les "hmm" et les regards en coin, généralement accompagnés d'une moue faussement dubitative : ce n'est pas une marque de désintérêt, c'est juste la concrétisation d'une barrière physique et morale à la digression intempestive. Et je sais qu'on est nombreux à pratiquer cette discipline.

3) Jamais je n'ai autant ruiné d'écouteurs que depuis cette sentence. La musique me permet en effet de fermer ma gueule. Et accessoirement de maintenir mon champ de vision périphérique en perpétuelle activité : marcher dans Bruxelles sans le son, c'est dangereux.
Vu que je ne suis pas la conversation des inconnus autour de moi, cela m'évite également d'avoir envie d'y participer, de devoir me contenir sous peine de faire un bide puis de ressentir le besoin incommensurable de devoir faire part de mes observations à mon entourage après coup.
Tout le monde y gagne, quoi.
Qui plus est, je connais désormais une cinquantaine de chansons par coeur, dans 4 langues, ce qui est inutile dans la vraie vie, mais tellement appréciable quand on joue à Buzz.

4) J'ai maintenant une quasi-admiration pour Mobistar : les 5000 sms gratuits à chaque recharge, c'est plus que vicieux. Mais bon vu que c'est quand même relativement lourd à taper et plus laggant que le langage parlé, ça freine pas mal.
Cependant, toute aide est bonne à prendre.

Si ces conséquences sont bien sûr extrêmement (?) positives, un accident est bien vite arrivé. Un taux d'alcoolémie supérieur à la norme autorisée, un coup de spleen, et bardaf. C'est exactement la même chose lorsque l'on suit un régime et que quelqu'un pose un paquet de frites devant vous : ça foire.

L'autre inconvénient est que je me dis qu'un jour, à force de trop incomplètement contenir les mots, ils vont jaillir de ma zone de Broca tels les trucs Illustrator qui s'échappent des pubs Coca-Cola. Ce jour-là, il sera donc temps de paniquer et d'entamer une retraite.

En attendant ce jour, je vais quand même essayer de trouver les couches, tout compte fait.


* ... et ne veulent toujours pas.
** Pour moi Access est à la joie de vivre ce que la purée d'anchois est à la tarte tatin.

samedi 18 avril 2009

Patiently correction leaves us all alone.




















If only I was sure
That my head on the door was a dream
.
The Cure - Close to me



L'autre jour, je lisais, pour une fois, un article un peu intelligent et élégamment intitulé "Language choice in bilingual, cross-cultural interpersonal communication"*. En gros, c'est pourquoi un couple - dont les joueurs ont chacun une langue maternelle différente - va choisir une langue plutôt qu'une autre pour communiquer. Une explication assez fréquente, bien qu'un peu pathétique, est que celui qui n'est pas dans son pays peut "imposer" sa langue, en guise de compensation territoriale. "Je fais l'effort de prendre mes petites pattes pour venir chez toi, alors apprends le mandarin, chéri". C'est gonflé.

J'aime bien.

Ailleurs**, j'ai aussi lu que certaines personnes, lorsqu'elles ne s'exprimaient pas dans leur langue maternelle, pouvaient parfois totalement changer d'opinion. Tout simplement parce qu'elles ne maîtrisaient pas assez le vocabulaire ou la syntaxe de la langue apprise pour exprimer ce qu'elles avaient sur le coeur... C'est dommage quand même, mais ça doit donner l'impression assez étrange de se mentir à soi-même ainsi qu'aux autres, juste pour sauver la face et ne pas (s') avouer qu'on est une tanche en langue. Ou tout simplement qu'on manque un peu de pratique.

Mais c'est vrai qu'à mieux y regarder, quand je parle néerlandais, j'ai tendance à légèrement simplifier...
De "ah oui, ce livre est vraiment terrible, j'ai bien aimé la symbolique et la dimension philosophique du contexte", on passe très vite à "het was leuk". C'est parfois tellement dur de ne pas buter sur les mots que, plutôt que de dire "euuuuh" 12 fois, on préférera édulcorer. Après tout, on n'y tenait pas vraiment à cette opinion : il y en a tellement d'autres qui sont beaucoup plus simples à expulser.

Bref, la communication, fléau des temps modernes s'il en est. Notre charmante société occidentale et contemporaine a d'ailleurs la manie de nous gaver affectueusement de conseils en tout genre, histoire de sauver, au choix : notre couple, notre vie, nos enfants d'une vie atroce sans flots de mots ni déballages affectifs quotidiens.
Même Science et Vie le dit.

Et oui.

On parle du bienfait de la communication, de la panacée de la métacommunication.

Et puis on voit des djeunz dans le métro qui parlent à leurs congénères avec leurs écouteurs bien enfoncés dans les oreilles, histoire de ne pas perdre une note de leur tas de décibels journaliers. Une histoire de fierté mal placée, probablement liée à Last.fm ou au compteur iTunes mais je m'égare.

Ou tous ces gens qui mettent le son de leur gsm à fond histoire que les autres ne puissent plus s'entendre, ne puissent plus s'échanger que quelques œillades outrées en soupirant bruyamment.

Donc je pense que la relève n'a pas l'air d'être (r)assurée.

En même temps, se comprendre en un coup d'œil plutôt qu'en un jet de mots, c'est parfois pas plus mal. Je crois que l'objectif à atteindre, c'est de ne pas se prendre la tête quand on n'a pas tant de temps que ça à perdre, de ne pas vouloir tout décortiquer. De laisser planer le doute et le mystère de temps en temps. De garder un peu de brut dans le taillé sur mesure.
Ça a un autre charme que de vouloir s'acharner sur de la syntaxe ou du champ lexical...et ne parlons même pas du langage non-verbal, voire pire, de l'analyse des silences. Mais il est vrai qu'il peut parfois être réconfortant de se raccrocher à des termes techniques, à des méthodes bien emportées à la pièce ainsi qu'à des comparaisons, plutôt que de s'attarder sur le côté improvisé, impulsif, émotionnel des choses.

Parfois, tout le reste n'est pas que littérature.


* Ingrid Piller, Hambourg
** oui mais j'ai oublié où.

vendredi 17 avril 2009

Rosemary, heaven restores you in life.
















Daddy, don't ever die on a friday
It could seriously damage your health.
Emir Kusturica & The Non-Smoking Orchestra - Daddy don't ever die on a Friday




Cette nuit, j'ai dormi comme un économiseur d'écran.
Une belle image devant qui masque tout ce qui continue de s'activer derrière. Et quoiqu'on en dise, ça continue à frétiller, à vivre et à se tortiller comme si de rien n'était. Pas moyen de connaître la tranquillité d'esprit, même en dormant.
Donc je me suis réveillée en sursaut et me suis dit que tout ça, c'est un peu comme "Le rouge et le noir" : c'est chiant.

J'aimerais bien pouvoir me balader dans une rue, et pouvoir vider ma tête, ma mémoire, comme s'il s'agissait de mes poches.
Jeter les vieux papiers et les tickets de caisse de 2005, garder les trucs pas encore périmés.
Laisser l'angoisse et garder la quiétude.
Ne fut-ce qu'un peu épurer, un peu relâcher la tension pour pouvoir enfin se concentrer sur le reste. Et vivre, sans devoir démarrer l'économiseur d'écran pour faire semblant.

Outre l'effet pseudo-philosophique et manichéen précité, on peut aussi voir ça d'un aspect pratique et beaucoup plus concret : oublier ce qui ne sert à rien.

Genre :

- plein de mots de vocabulaire totalement inusuels
- ou des anecdotes à la con
- des trucs qui, juste après les avoir exposés, vous font vous exclamer : "mais pourquoi je sais ça?"
- des gens.

Parce que je suis convaincue, que, comme sur les cartes mémoire (cassedédi à Stevan), il y a un moment où c'est plein. Donc il faut évacuer le trop-plein pour le remplacer par de nouvelles données, pour ainsi parvenir à un niveau d'amusement optimal*.

Parce que quand je m'aperçois que je connais par cœur les paroles d'une chanson en turc, et que je bloque sur une définition, en français et en 3 points, ça me fout les boules.

Parce que, comme beaucoup de choses, ça serait tellement facile que personne ne s'en servirait.

Mais bon, on n'est pas à l'abri d'une erreur de manip' : si on efface par mégarde un fichier sain, est-ce que ça va nuire au bon fonctionnement des autres?

Et pendant que je me pose des questions procrastinantes et sans fin, Sony et Toshiba suppriment 5900 emplois, Marine Le Pen est sur le point de succéder à son père et YouTube organise un concert symphonique.

Finalement, pas mal de gens devraient stopper toute activité pour ne penser à rien. Ça leur éviterait de faire des conneries.


* "S'amuser seul" est un programme Gilbert Software, nul besoin de le rappeler.

samedi 11 avril 2009

Excuse my manners if I make a scene.





















Wake up
!
Grab a brush and put on a little makeup
.
System of a Down - Chop Suey!




Bon, ben il faut croire que c'est revenu. C'est toujours quand on dit qu'on ne le fera plus que ça vous reprend, et ça n'en est que plus obsessionnel.
L'appel de l'encre virtuelle ou non est donc réapparu. Et ça c'est bien. Du moins pour moi. Vous, je n'ai pas trop envie de savoir, il faut bien l'avouer. Mais je vais vous expliquer pourquoi.


On m'a souvent dit que j'écrivais rarement sur des sujets positifs.
C'est parce que j'aime pas ça.


Je n'aime pas ça, parce que c'est d'un banal sans nom. Pour être exacte, c'est surtout le procédé de banalisation qui me gêne. Ça rend la chose accessible à tous, critiquable par tous. Ça la circonscrit, ça la réduit, ça la définit.
Bref, ça la vulgarise.
Plein de gens, y compris ceux qu'on n'aime pas, auront accès à cette chose, à ce petit coin de paradis en carton dont on était si fier, dont on se sentait l'unique propriétaire. Chacun va y aller de son petit commentaire assassin : "Quoi, tu aimes ça??!", "Mouais fin ça casse pas trois pattes à une brique". Après on va y réfléchir, et on va se dire que, effectivement, on s'est un peu emporté et que finalement ça ne valait pas ça. Si l'on part de ce principe, rien ne vaut rien s'il est confronté au goût des autres.
On peut donc premièrement dire que je pratique la rétention verbale et émotionnelle à des fins purement égoïstes, voire misanthropes.

Ensuite, et ça me gêne aussi, on rend le concept présentable, socialement acceptable et politiquement correct.

Tout plat quoi.

Genre le fait qu'il soit positif pour une seule personne ne suffisait pas, il faut en plus de ça qu'il le devienne pour tout le monde.

Prenons l'exemple du mec qui a découvert des îles, mettons les Grenadines parce que c'est joli. Et bien aujourd'hui, bien qu'il soit mort, il doit ressentir la même chose.
Il avait trouvé un coin sympa, on pouvait déconner et procrastiner en toute simplicité, tout en mangeant de la mangue fraîche en n'en ayant rien à foutre que le jus dégouline de partout vu qu'il suffisait d'aller se baigner dans l'océan LIMPIDE après.
Maintenant dessus il y a 5 Club Med*, un Burger King et un Starbucks. Donc si on résume bien, le découvreur des îles Grenadines, il a les boules parce que son havre de paix est devenu une destination last minute relativement courante.

Parler d'un truc positif, c'est le donner en pâture à l'opinion publique. A ceux qui ne demandent qu'une chose après une journée de merde, pluvieuse et pleine de rapports à rendre pour hier : détruire. Le mieux est l'ennemi du bien...c'est toujours dur de placer une expression bateau avec un minimum de cohésion, mais parfois ça en vaut la peine.
D'une belle pierre un peu mystérieuse, tirant son charme de sa forme douteuse et asymétrique, on obtiendra un bête galet, poli à force d'avoir été retourné dans tous les sens, d'être passé entre d'innombrables mains. Tout lisse, tout simple. Qui plaira à tout le monde, ou tout au moins qui ne dérangera personne.

Alors, j'ai envie de dire, pour une fois, jouons-la perso et ne démystifions pas. Gardons le bonheur et tous les trucs positifs pour soi, bien à l'abri dans une heart-shaped box.
Ça vaudra mieux pour tout le monde.


* Tant qu'on est dans le domaine de la protestation, j'ai AUSSI quelque chose contre le Club Med

vendredi 10 avril 2009

Bring your sister over here.
















I need, no need no alibi
Honestly I'd tell a lie.




Tous ces petits gestes cons et inutiles...

Quand j'ai un truc en tête, ou que le truc en question me la prend, j'augmente le volume, et bien. Genre la musique va prendre la place de mes pensées, les écraser, les évincer, les émincer. Et il ne restera que des notes, des paroles écrites par d'autres, qui pensent à autre chose vu qu'ils sont californiens et forcément über-cools.

Quand je prends mon stylo préféré juste pour écrire des conneries, parce que c'est lui qui me donne des idées. Mais si.

Quand on me propose fort sympathiquement quelque chose et que je réponds systématiquement non, tout en le regrettant. Parfois.

Quand je passe dans le couloir de mon habitat estudiantin, en m'auto-serrant compulsivement dans les bras, tout en courbant l'échine et plissant les paupières, histoire de contrer les monstres ou plus probablement d'éviter la chute du plafond en papier mâché (vert fluo).

Quand des conneries m'interpellent.
Comme, par exemple, le fait qu'autrefois Nokia possédait dans ses messages tout faits (du genre "je suis en réunion, rappelez dans une autre vie") le moins classique "moi aussi je t'aime".
Comme la touche "avion" sur les lecteurs de cartes Mobib.
Comme quand la secrétaire de la filière communication de la faculté de philosophie et lettres (titre de noblesse entier) nous envoie à tous une invitation pour aller à un congrès de physique nucléaire à Francfort.
Comme le fait qu'en faisant alt gr + g, ça donne "fi".



Comme si ça allait changer quelque chose, et pourtant si.
Ça donne du relief, ça permet de voir au-delà de ce qui ne mérite pas d'exister ou d'avoir de l'importance.
Ça donne l'impression qu'il y a une vie après la vie et que tout ne s'arrête pas, faute d'intérêt ou d'impact sur le quotidien.
Ça donne l'illusion d'avoir quelque chose de spécial. Alors que non.
Bref, ça occupe.