vendredi 23 décembre 2011

Demain, c'est malheureusement le réveillon, inutile de se voiler la face. D'habitude, je joue le jeu tu vois. Ça m'éclate d'acheter des cadeaux, de préparer un menu et dans la rue il y a cette ambiance spéciale, qui fait qu'on sait qu'à peu près tout le monde est en train de faire la même chose. Mais cette année, c'est un peu différent... C'est juste qu'il me manque une personne, que je ne pourrai pas l'appeler le 25 (alors que les années précédentes j'y pensais parfois de justesse) et à qui je ne pourrai pas offrir de pâtes de fruits. Ainsi va la vie, no hard feelings...mais bizarrement je ressens plutôt de la culpabilité, comme si j'allais renier ma tristesse et mon trou au coeur en mangeant de la bûche et en ne prêtant pas attention aux bêtisiers à deux balles. C'est en l'écrivant que je me rends compte à quel point c'est bête, d'ailleurs.
Bref, quelques jours après cette soirée fastueuse, je m'envolerai (en car...) pour Londres, histoire d'aller me promener dans des rues d'un gris différent.

mardi 20 décembre 2011

Bordel mec, j'ai la rage. Mais en bien. Comment expliquer à quelqu'un ce genre de truc? C'est bien d'avoir la rage, parce que ça empêche de s'apitoyer sur son sort, ça retient de tomber dans la dépression et ça donne envie d'aller voir plus loin, juste pour faire bisquer la douleur. Souvent je serre les mâchoires et je souris un peu en même temps, mieux vaut ne pas savoir ce que ça donne de l'extérieur d'ailleurs, mais je me sens presque bien quand je me sens mal. Parce que ça veut dire que je ne suis pas si morte que ça de l'intérieur, que mes tripes ont toujours une utilité, que quelqu'un, dans mes rêves, me sauve encore. Mon abdomen se distend, mon poing se serre, mes dents grincent. Rituel un peu lancinant et désarticulant, comme de la psy goa mais en très très lent.
Ça me fait penser que ça fait trop longtemps que je ne suis plus allée danser...

samedi 17 décembre 2011

C'est marrant, j'avais oublié ce que ça faisait... Cette année a été rugueuse, amère et acide à la fois, du coup je ne m'y attendais pas, je vivais un peu en-dehors de ces préoccupations, à clamer que la solitude était ce qu'il me fallait le temps de me soigner. Alors qu'au fond de moi, je savais très bien que non tsé... Du coup quand il a débarqué, j'ai bien essayé de tenir bon au début, mais quelque chose m'a attirée vers lui. Une profondeur dans le regard, comme une blessure mal refermée, quelque chose de très fort, en tout cas... Et donc, j'avais oublié à quel point c'était doux de penser à quelqu'un comme ça. D'un côté j'ai très peur d'y croire, d'un autre, je crois que ça me plait vraiment bien...

vendredi 16 décembre 2011

Enfin. Un peu d'espoir et du changement et de la vie d'avant et tout qui tourne et pour finir je ne sais plus trop. Les larmes sont au bord de mes paupières, mais pas menaçantes, juste chaudes et réconfortantes, juste pour dire "t'inquiète, on est là et on veille sur toi", pas des larmes de tristesse mais juste de plénitude, d'apaisement, de calme. Des larmes de calme. J'aurais jamais cru. J'ai pensé mourir plusieurs fois cette année, j'ai élaboré des plans pour les replier aussitôt, j'ai vu des marques sur mes poignets mais elles ont disparu. Je me sens bien et en même temps, je ne peux m'empêcher de penser que ça ne durera pas, que tout ça n'est qu'une blague cruelle qui ne fera que m'érafler un peu plus. Raison supplémentaire de profiter de chaque instant, comme si c'était le dernier, tout simplement.

vendredi 4 novembre 2011

Tu sais, parfois j'ai un peu envie de parler. Pas d'aller pomper l'air de tout le monde en imposant la douleur et la fatigue et "je" blablabla, mais juste de parler à une personne, de préférence susceptible de ne pas m'envoyer un truc tranchant à la gueule. Juste pour raconter des trucs et ne pas devoir tout justifier. Mais y a pas. En ce moment, personne n'est taillé pour le rôle. D'un côté, tant mieux pour eux.
Parfois je me dis que je suis trainee retired, en anglais pour faire moderne, ou juste pré-pré-retraitée. Un avant-goût de ce que doivent ressentir les vieux en maison de retraite, somme toute.  C'est génial, à 27 ans, de pouvoir se dire qu'on ressent cette détresse, cette envie de parler coupée par un "non mais je vais l'emmerder avec mes histoires", cet étranglement quasi permanent. Ce pathétique, somme toute.
Ce qui me rassure, c'est qu'avec l'entraînement intensif que je su(b)is maintenant, impossible de me foutre dedans plus tard. Tu peux pas test.

dimanche 30 octobre 2011

Un truc qui je sais est très mal mais (au cas où un lecteur extérieur viendrait malencontreusement se perdre ici) que j'affectionnais particulièrement, ce sont les somnifères.

Alors oui, ça a quelques inconvénients, et non des moindres, on est bien d'accord. Surtout qu'après deux bons mois d'utilisation quotidienne, je peux confirmer que les effets secondaires comme les pertes de mémoire et les lapsus ne sont pas une légende. Et la dépendance non plus.

Mais quel bonheur... Le bonheur de pouvoir aller se coucher sans angoisser, sans avoir à craindre de se retrouver face à ses fantômes à la con.
Et nom de dieu cet état de félicité absolue, ce moment où l'esprit s'en va tout doucement dans la pièce d'à côté, que les mots ne demandent qu'à jaillir et qu'il faut les retenir. Parfois sans succès. Souvent, en fait. J'en ai dit des conneries, et merci les logs msn au réveil le lendemain. Car même en lisant les mots-clés, je n'avais absolument aucun souvenir de la conversation de la veille. La joie, merde. 
Les muscles qui s'amollissent, les articulations qui se décontractent, le souffle qui se fait plus lent. Mieux et moins cher qu'un massage, l'expérience surréaliste en plus. 

Puis un jour, la boite est finie, il faut retourner dans le monde réel. Retrouver l'insomnie, les tournades et retournades dans le lit, les coups d'oeil aux chiffres digitaux et rouges. Et penser avec nostalgie aux moments où le sommeil n'était pas un mur...

vendredi 28 octobre 2011

Ces derniers jours, la douleur est d'une intensité telle que mes canaux lacrymaux sont comme resserrés. Ou asséchés, un peu comme une portion de Nil après un été trop fringant. Même pas moyen de pleurer, tout a déjà été dit. La fatigue m'enveloppe et me donne l'impression d'être enrobée de coton toute la journée. J'aimerais bien que ça cesse oui. Mais je ne peux même pas penser à ce que ça ferait, vu que j'ai oublié ce que ça procurait comme sensations de n'en ressentir aucune de négative. Je plains mes récepteurs synaptiques, qui doivent bien ramasser. Ce qui m'embête le plus, c'est que même la nourriture ne passe plus. Un peu comme si le coton en question était enfoncé jusqu'au plus profond de ma gorge. Du coup, mes forces se font probablement encore plus la malle. 

Il parait qu'il y a une fin à tout?

mercredi 19 octobre 2011

C'est marrant la cortisone. Je vais devenir une machine de guerre. Ouais. C'est d'autant plus cocasse que ça rend nerveux, et en même temps, ça donne envie de ricaner sardoniquement en criant  mentalement très fort comme un lapin crétin. Tu penses en all caps en fait. C'est un peu de l'auto-agressivité envers toi-même* et aussi, soyons honnêtes, un peu envers les autres. On va dire que c'est la fatigue. Et l'angoisse. Parce que bon on rigole mais la douleur est toujours là. Elle est même très là. Entre deux ricanements internes mes yeux roulent, comme s'ils voulaient se planquer pour ne plus voir flou. Pour ne plus voir tout ça, tous ces gens, tout ce monde si... vivant. Hier j'étais dans le métro, assise par terre parce que les sièges où tout le monde se regarde d'un air gêné étaient malheureusement pris, et mon dieu ce que je me sentais seule. Parmi tous ces navetteurs. La musique couvrait absolument toute l'activité, c'est comme si j'étais dans une capsule de douleur en plein milieu de tout, j'avais l'impression que mon aura malade était visible et que les usagers de la STIB s'écartaient naturellement.
Et puis, si je me souviens bien, j'ai eu envie de rire.


* j'aime beaucoup les pléonasmes. Et ils me le rendent bien.

mardi 18 octobre 2011

C'est fou quand même ce besoin de raconter sa vie à tout va. Peut-être pour chercher l'approbation d'autrui. Peut-être aussi parce que je n'ai personne à qui "vraiment" parler. Et que cette année d'enfermement forcé, de réconfort post-chimio et de soutien moral à qui en avait besoin est un peu trop lourde pour mon sac à dos.  J'ai tenu pendant très longtemps sans parler ni écrire vraiment, tout en accumulant. En cherchant le lisse apparent plutôt que profond. Il faut donc croire que je le paie maintenant. Parce qu'aujourd'hui, le moindre petit événement un peu contrariant est la poussière de trop sur le tas de crasses de cette année. Mais même si ça fait un peu mal de ressasser tout ça, j'aime cette sensation de poser les mots. De les déposer plutôt. De m'en débarrasser. Après tout, si ça tient en quelques caractères, compris par des millions d'autres personnes, c'est que ce n'est pas si grave au fond. Enfin j'aime à le voir comme ça. Un peu comme si les mots, laissés en consigne ici, ne pouvaient plus me rattraper.
Et surtout, ce que j'aime avec ce blog, c'est le fait de pouvoir enfin parler librement. Parce qu'aucun membre de mon entourage n'en possède l'adresse. Personne n'est obligé de lire, de commenter, de conseiller, de panser, de réconforter.
Ca fait un bien fou de se libérer de tout ce poids et de pouvoir cracher, sans offusquer ni gêner qui que ce soit.

lundi 17 octobre 2011

Là tout de suite ce soir, c'est le contrecoup d'à peu près un an. Il paraît que la roue tourne. En général quand on me dit ça je souris et je pense à "La roue de la fortune". Pour éviter de penser à ce que la vie serait si la roue tournait.
J'ai l'impression d'être trop vieille et de ne pas pouvoir taper du pied dans le fond du bassin pour remonter. Il faut un peu de temps pour digérer des heures de stress dans les couloirs d'hôpitaux, dénouer ses tripes et ne plus avoir l'impression d'avoir cette odeur collée à la peau.
J'aimais bien celle que j'étais avant, tout compte fait. Ici, chaque personne croisée me fait entrevoir tout ce que je rate en ce moment-même, tout ce que j'aurais dû/pu faire. Tu vois il y a des livres fabuleux sur "comment annoncer sa maladie à un proche", "comment gérer la maladie d'un proche" mais aucune sur "comment gérer la connerie (pourtant pleine de bonne volonté à la base) des proches". Et leurs phrases à l'emporte-pièce, censées panser et combler tous ces silences embarrassés. Mais ça ne marche pas. Ce qui fait qu'après tu te retrouves à blaguer et à user d'auto-dérision en te torturant les tripes, et encore après tu n'as plus envie. De rien.

Ça va passer tsé.

dimanche 16 octobre 2011

Mec, la cuisine me manque. Beaucoup. 
Mais impossible de tenir debout/assise donc, à part un ou deux gâteaux hein... 

Et manger me manque. Surtout. Manger des choses peut-être interdites dans le futur, comme par exemple, LE GRAS. Mordre dans une pointe de pizza encore brûlante et sentir les arômes de tomate, basilic et mozzarella se mêler tout d'un coup. Pour l'instant, il n'y que la croûte qui passerait.

Bientôt un an que je mange du pain et des pâtes, sincèrement je suis un peu fatiguée. Pour changer.

samedi 15 octobre 2011

Hier, j'ai commencé la cortisone. Avec à la fois de l'espoir et une certaine perplexité face aux effets secondaires tels que "entendre des voix/voir des choses qui n'existent pas", "se sentir seul" et "avoir des envies suicidaires". Pour l'instant, j'ai juste des vertiges et merci bien.

En fait, tout ce parcours visant à obtenir un diagnostic dure depuis tellement longtemps, que je ne peux m'empêcher de le trouver un peu vain et dénué de sens. La fatigue, probablement.
Ou les voix dans ma tête, hein, va savoir.

Bref, tout ça pour dire qu'à choisir, j'aurais préféré vivre dans le SkyMall. Pour être couverte de parures luxueuses et un brin vulgaires, tout en défiant les légumes avec un sabre laser et  en fermant hermétiquement le grenier pour empêcher l'amiante de s'échapper.

mardi 11 octobre 2011

It's oh so quiet.








But when I feel like shit,
I feel like shit.*
Suicidal Tendencies - Pledge Your Allegiance







Aujourd'hui j''aimerais remercier un intangible, parce qu'on a tendance à se focaliser sur le concret, le lourd, le vrai. Grossière erreur. On pense souvent à remercier les gens, éventuellement les gens imaginaires (ne pas commencer un article sur les JMJ, ne pas) mais rarement à ce que l'on ne peut serrer tendrement sur "Dreams are my reality". Donc ça m'a donné envie de parler de l'une des trois choses qui m'ont sauvé moult fois la vie : internet.

Internet, comment te dire à quel point je te remercie, malgré le pathétisme que tu peux involontairement induire. Tu arrives à transformer les heures en minutes, surtout les heures d'attente, tout en donnant l'impression, fuck yeah les envolées lyriques, d'ouvrir une fenêtre sur le monde (enfin surtout sur l'ennui des autres mais passons). Sans toi, pas de rigolades pendant les nuits d'insomnie en compulsant Tumblr, pas d'écrivage de blog intempestif pour calmer les nerfs, pas de découverte de modèles de point de croix encore plus cons que les précédents. Pas de dialogues de sourds, à en serrer les mâchoires de perte de patience, pas d'échanges de clips des 90's. Tu apportes en fait une poignée de confettis dans un panorama composé essentiellement de salles d'attente et de fatigue permanente, le tout enrobé de terminaisons nerveuses en furie.

Vu la situation actuelle quelque peu surréaliste, qui veut que les personnes faites de chair, sang et contre-empathie ne fassent plus vraiment partie du décor, je te serre très fort (et tu sais ce que ça me coûte...). 




* nul appel à l'aide mal déguisé ici, mais un gros big up à la langue anglaise, qui arrive à faire passer pour profondes des phrases d'une lourdeur magique dans toute autre langue.

lundi 10 octobre 2011

Parfois des trucs reviennent comme ça. Des trucs en images, gravées sur la rétine. Qui font stopper net toute activité.

Un regard bien hagard jeté vers un brancardier. Des paroles faussement réconfortantes et anodines pour tromper l'attente. Et mon dieu toute cette tiédeur, complètement affolante, si pesante de par sa légèreté totalement déplacée en ces lieux aseptisés, ancrés dans une routine froide, implacable et inhumaine.  La tiédeur qui pourrait faire croire que tout va encore bien, qu'il n'est pas trop tard, alors que.
C'est sûrement ce qui m'a le plus marquée, l'insolence de la température et son manque de gravité,  de compassion en fait. Son innocence était de trop, comme feinte, comme ce fameux leurre qu'est "ça va aller tu sais".

Cette barre d'angoisse embrochant les clavicules pour venir rouiller jusque dans les côtes, contraignant ces dernières à se soulever à un rythme bien plus lent, plus oppressant.

Et puis le soulagement, tellement coupable et tellement justifié, pourtant. 

Cette impression de ne pas avoir assez profité avant, sans pour autant y arriver, maintenant. Tant de mots contenus, durant des années, et qui ne trouveront dorénavant plus aucun écho. L'amertume est passée, mais la tristesse restera encore un peu.

jeudi 6 octobre 2011

Is it Johanne/a*?
Nope, Chuck Testa.

Mais en fait ça va bien, moralement tout ça. Les jours s'enchaînent et les dates importent peu, c'est plutôt "plus que 35 fois dormir avant le prochain rendez-vous". Ensuite, "on verra bien", qui est un peu mon master hit de ces deux dernières années.


* sincèrement, impossible de choisir

samedi 1 octobre 2011

Le bracelet brésilien qu'il m'a donné.






Ce qui me lourde particulièrement dans cette vie, c'est le besoin de tout peser, planifier, de devoir calculer le moindre geste. 

Peser, car ici on pèse tout. Les mots, d'abord. "Mal" et "douleur", surtout. Ceux-là on apprend à les doser, à les prélever miette par miette afin de ne pas s'intoxiquer et surtout de ne pas effrayer ou s'attirer les foudres de l'autre. "Souffrance", on oublie carrément. Trop Danielle Steel.
On pèse aussi le pour et le contre de chaque opération à effectuer, de chaque rendez-vous, de chaque geste, finalement. Parce qu'il faut garder des forces pour après, si besoin est. Chaque action devrait être pondérée, avec un nombre de points à ne pas dépasser par jour au total. Le weight watchers appliqué à la vie, mec. Le problème est que parfois l'envie, sentiment ô combien irrationnel, vient se mêler à tout ça. Surtout si on apprécie la personne qui fait la requête. Ce qui fait généralement exploser le score. Les points excédentaires ainsi engrangés seront bien entendu déduits de la provision du lendemain... Sick sad world.

Planifier, ce qui est ici un gros paradoxe. Premièrement, il faut bien prendre conscience que tous les gestes ne seront pas possibles et secondement que ceux qui seront possibles ne le seront pas forcément toute la journée. Et enfin, la notion de planification implique également l'annulation de dernière minute ou variable totalement indéterminable, vu qu'il est impossible de prévoir quel nerf va se coincer, quelle jambe va traîner, quel trouble va subir la vue. Ce qui donne en résumé : oui, enfin peut-être mais pas tout le temps vu qu'on ne sait jamais, je te confirme si je peux et s'il te plaît ne m'en veux pas si ça ne va pas. Bordel, ne m'en veux pas.

Le stade du calcul est quant à lui la somme (ou la soustraction?) des deux actions précédentes. Autrefois j'étais dans la classe des nerds dont tout le monde se foutait, en math 8h et sciences appliquées, espérant que ça me servirait plus tard. Et bien ça ne m'aide absolument pas. Ca ne m'a jamais aidée. Mais parfois je repense aux gnomons et souris parce que le nom est mignon. Ou au jour (11.11.01) où le prof a débarqué en classe surexcité et nous a fait traduire la date en partant du binaire. Soit. Tout ça pour dire que je n'ai pas les skills. Du tout. Mais que ça n'empêche pas d'en sourire un minimum.

De cela découle donc un léger boxon dans ma vie sociale, faite d'espoirs, d'excuses et de chansons écoutées en boucle pour ne pas penser.


vendredi 30 septembre 2011

En kwasi un an de clouage au pieu, c'est la première fois que le dehors me manque. Parce que d'habitude j'évite d'y penser, de lire les statuts Visagelivre de mes "amis" qui ont une (des??) vies, de regarder des photos d'avant où j'ai un œil nettement plus petit que l'autre et les joues rouges et un verre à la main et les cheveux détachés*. Et voilà que bon, ce soir, ça me prend. Peut-être parce que j'ai passé la semaine à mâcher de l'ouate en me prenant des coins de meubles dans le brouillard, comme dans un cauchemar de série Z. Mais vu que pour des raisons totalement indépendantes de ma volonté (mais qui m'amusent beaucoup), je ne déprime pas, j'essaye de me poser de vraies questions. Celle de ce soir est "pourquoi le fétichisme de la laine?". D'ailleurs si l'un de vous 5 sait...


* signe imparable de mettage de mine dans mon cas

samedi 24 septembre 2011





Aujourd'hui, je suis un très vieux castor. J'ai mal à m'en racler les gencives sur un mur en crépi, alors je regarde "The IT Crowd" et toutes les émotions se mélangent... Je ris, pleure et me contorsionne de douleur en même temps. C'est fou parce qu'à chaque fois, j'ai l'impression qu'il ne m'est pas possible de repousser les limites du point de vue gestion de la douleur. Et pourtant.
En un certain sens, ça m'est totalement égal. Parce que j'ai le sentiment que commencer à en être affectée serait le début de la fin. Que les digues lâcheraient et qu'il serait alors impossible de revenir en arrière. Jusqu'à présent, j'ai la très curieuse sensation d'avoir dissocié totalement le physique du moral, même si je sens que la limite entre les deux s'effiloche lentement. Mais pour l'instant, je m'en fous, aussi.
En un autre sens, c'est comme si la minute suivante pouvait être celle de trop. Parce que le jour où il n'y aura plus de place dans mon panier à patience, ça va chier.

Mais en attendant, rions.


mercredi 21 septembre 2011

Encore de l'épuisement, dis. Plein. J'ai l'impression de sentir mes cernes se lester davantage chaque heure, mon rythme cardiaque s'alourdit, jusqu'à battre dans le fond de ma gorge. Et tout ça pour? Attendre. Toujours. C'est drôle de voir que lors de mes derniers rendez-vous médicaux, il n'était même plus question de soulager la douleur. Tout ce qui est acceptable a déjà été essayé. Donc selon un accord très tacite, ni les médecins ni moi n'abordons la question, ce serait à la limite du ridicule vois-tu. Seulement eux, ils referment mon dossier et passent à autre chose. Ici je connais par coeur les murs et les plafonds, je sais de quel sujet je ne veux pas me parler, je sais quels gestes me sont interdits. Mais je les fais quand même. Par défi, par preuve de survie à la con, sûrement.

Les heures passent en me râpant la joue comme du papier de verre.

lundi 19 septembre 2011

In the Kingdom of Kitsch you will be a monster .

"Won't you take a walk outside?"
-Oh no.
"Can't you find some other guy?"
-Oh no.

 The Strokes - The End Has No End






Dans la série "les trucs par 3", continuons ici avec le pendant suisse des "trucs que j'aime".

Dedans la vie, j'arrive à m'intéresser à quasi tout et surtout ça m'intéresse de m'y intéresser quand je connais quelqu'un, peu importe qui. J'aime bien comprendre ce qui fait vibrer les gens. De Studio 1 à une expo de compression cubiste, en passant par le point de croix geek et les méthodes de drague au Népal.  Pour te dire, quand j'avais 16 ans, je me suis même tapé les cours de batterie de Michel Port-Noix en VHS.

Mais parfois, il y a des trucs, malgré un acharnement certain, que je n'arrive pas à aimer. Ou à détester. Ou même, cas rare, à avoir un semblant d'opinion dessus. Et j'aimerais bien, mais le problème est que j'en ai rien à foutre.

Ca m'a perpétuellement fait ça avec le droit. Durant mes études tumultueuses et inutiles, j'ai eu l'occasion d'en tâter, du droit : public, privé, commercial, des médias, des assurances. National. International. Un peu comme les crevettes dans Forrest Gump, en fait. Bref, ce sujet a beau être contemporain, de la plus haute importance dans notre société et blabla, pas moyen. Quand je lis un syllabus de droit, les caractères coulent dans ma tasse à café et je me retrouve à penser à totalement autre chose. Au mieux, ça me rend juste un peu triste tellement ça ne m'intéresse pas.

Ceci vaut également pour les trucs bio. Alors autant le droit me désespère, autant le bio m'énerve mais à fond sa race, tout en mettant l'emphase sur mon désintérêt. Principalement parce que les marques ont réussi à faire d'une chose totalement normale (le droit de regard sur la provenance et la production d'un bien de consommation) un luxe, un label, une hygiène de vie de bobo branchouille. Well done, capitalism. De mon côté, je me contrefous de bouffer des acides gras trans, du mercure, des nitrates ou que sais-je. On va dire que le bio "existe" commercialement depuis environ 3-4 ans, ce qui veut dire plus de 20 ans à manger des saloperies : à mon avis, je suis déjà cuite, mec.

Et le troisième truc : les chatons. Trop de mignosité tue la mignosité, c'est bien connu. Je regarde ce chat en devenir et je me dis...ben rien. Mais vraiment rien. Ca ne suscite absolument aucune émotion digne de ce nom en mon fort (ou plutôt chalet) intérieur. Du coup les lolcats, très peu pour moi et les calendriers de la poste encore moins. Ceci est également valable pour les photos de bébés. Par contre les photos de bébés tapirs ça me donne envie de faire "hiiiiiii". Va comprendre...



samedi 17 septembre 2011

More animal.








God forbid if you forget to close the door as you're leaving, 
I hate to see you in a bind
With a dog in a bag, 

Sleeping next to your ridiculous mind.

 The Fratellis - Doginabag





Normalement, tous les jours ça va. Et puis, de temps à autre, un jour se glisse et le tas de mikados se prend un peu un coup sur le museau. 

Aujourd'hui est un jour. 

Un jour où je me souviens de ce que ça fait d'être jeune. First world problem, oui. Mais j'aimais bien rentrer chez moi tranquillement, à 6h, les cheveux imbibés de tabac, le maquillage bringuebalant, les muscles endoloris d'avoir dansé comme une perdue sur une table quelconque. La fatigue que tu ne sens pas encore et que tu retrouveras vers 14h, l'odeur réconfortante des croissants émanant des boulangeries en train de se mettre en route, les dernières brumes d'alcool que tu laisses à chacun de tes pas. Et les passants, qui parfois te décochent un petit regard en coin du style "je sais que tu viens à peine de dessaouler, mais limite je t'envie". 

En fait, maintenant c'est à mon tour de regarder passer les gens. Parfois, soyons honnêtes, ça me rend un peu triste. Parce que je trouve ça tôt pour une fin de fête, vois-tu. Alors je ferme un peu les yeux et j'essaie de me remémorer le plus justement possible ce que ça faisait de se sentir vivre, tout en ne voyant pas les heures passer. Les visages défilaient, les ambiances s'enchaînaient, de temps en temps les discussions s'enflammaient. C'était tellement normal. Si j'avais su, j'aurais tenté d'en garder plus de souvenirs, de conserver des bouts de tissus, de capturer des odeurs dans des petites bouteilles de verre. 

Et pourtant, même si je ne me l'explique pas, ça ne me rend pas amère. Je suis sincèrement très contente que mon entourage soit en bonne santé et frétillant. Ça me permet de croire que ça existe réellement, c'est le lien avec le vrai monde. Tant que j'arrive à profiter de ça, c'est que finalement ça va.


jeudi 15 septembre 2011

Devin Townsend - Night on Ocean Machine, 1997




Devin, c'est mon idole. Mieux que les Oreo, la pluie battante et les paillettes réunis. 

Son concert au Biebop en mars dernier, c'était magique. Tout simplement. Ce gentil homme est canadien et tout pur, doté d'un charisme absolument sidérant et d'une aura de bonté assez déstabilisante. Il a pour habitude de pondre 2 à 3 albums (alba ou albi pour les puristes) par an, souvent de genres assez différents. Par exemple "Ziltoid the Omniscient" (2007) est un album pour lequel Devin a créé une petit mascotte toute verte, avec des yeux fous, dont le but est de venir voler notre café. C'est d'ailleurs Ziltoid himself qui présente les concerts sur un écran à projection. Oui madame. Juste après l'intro, qui fut comme de bien entendu "We Like to Party!" des Vengaboys...

Le son était parfaitement géré, voire un peu trop parfois, mais il suffisait de regarder ces trois gars sur scène pour oublier tout ce qui aurait pu être mieux. Parce qu'au fond, on s'en fout de ce qui aurait pu être mieux. Il y avait tellement d'énergie positive qui se dégageait de ce show (et pourtant, le new age ne m'est pas familier) que même les plus true des métalleux avait les yeux qui brillaient, je te promets. Après le concert, il y a eu plus de "mec, c'est le plus beau jour de ma vie" dans le public qu'à la sortie de l'Enfer de Sclessin en 2009. Je ne peux l'expliquer, mais après 2h en sa compagnie, on avait l'impression que tout était possible et que finalement les gens n'étaient pas si pires. On avait juste envie d'être bien et d'y rester.

Le lendemain, les mots me manquaient et ma gorge se serrait à la simple évocation de son nom.
C'était ça en fait l'adolescence?

mardi 13 septembre 2011

Another one bites the dust.







Denis Denis, avec tes yeux si bleus
Denis Denis, moi j'ai flashé à nous deux
 Blondie - Denis






Ce qui est embêtant quand on a mal, c'est qu'on a l'impression de saouler tout le monde. Parce que parfois c'est un peu ou très vrai et, selon la personne qui exprime son ennui, ça peut s'avérer traumatisant.

Petit à petit, claque sur claque, j'ai plus ou moins compris qu'il fallait essayer de prendre le moins de place possible et respirer la joie de vivre autant que possible. Vu qu'en plus je n'avais (et n'ai) même pas de diagnostic approuvé par la fédération, il était encore plus conseillé de la fermer... Mon charmant entourage était donc nimbé d'un doux cocon d'ignorance, pensant de bonne foi qu'il s'agissait simplement d'un lumbago, de douleurs lombaires banales et inintéressantes. J'ai ri, marché, couru, autant que j'ai pu.

Puis un jour, il n'y a pas si longtemps, je n'ai plus pu.

Je n'ai plus pu jouer à tout ça, à faire semblant, à être sans cesse au taquet pour pouvoir détourner la conversation, à retenir un hoquet de douleur ou un spasme. J'ai lamentablement flanché.  Pas par dépression ou lassitude non, même pas. Juste par fatigue physique, épuisement total impossible à cacher. Même avec du roll-on Garnier qui tue. Alors petit à petit, j'ai disparu, fondu. J'évite de répondre aux mails ou au téléphone, parce que c'est quand même pour essayer d'esquiver le "et toi?" ou mentir. Et peut-être que c'est un peu scarifiant de mentir. Du coup j'évite, tout simplement. Ça me fait mal en un sens mais ça épargne l'autre et ça, c'est important. Sinon il tire une gueule jusque par terre, te prédit de longues années atroces et planifie la date de ta mort. J'exagère oui, mais pas tant. Au final, je me retrouve donc souvent à rassurer l'autre en question avec des banalités totalement affligeantes. Dont voici le top 3:

1) "Ça va aller" (level 80 tsé)
2) "Non mais tu sais la médecine fait des progrès"(..."lol")
3) "Et puis bon tu sais, il y a pire" (ce qui ne change absolument rien à la situation et qui te fait te sentir encore plus boulesque)

D'où l'intérêt d'avoir un blog, afin d'éviter toute sensation de poids sur autrui. Et encore. Non en fait pas du tout. Mais c'est toujours mieux que la réalité et au moins je ne force personne à lire de son mauvais gré.

Arrêter de se justifier? Mmmh.


jeudi 8 septembre 2011

L'émission "No Limit" de la Deux est à la veille technologique ce que "hé miss" est à la phrase d'accroche efficiente.

Donc comme je le disais il y a quelques posts, j'ai toujours réussi à maintenir mon niveau de haine-rage-colère à un niveau acceptable. Avec un petit carnet mental, où les points s'accumulent, doucement, tendrement presque.

A l'heure qu'il est, je suis probablement endormie sa race, grâce à une quelconque substance. Tant mieux, parce qu'au moment où ces lignes s'inscrivent à l'écran, une tension me barre les épaules, m'enserre la taille et m'égratigne les reins. Quand ma conscience refera surface, il y aura un mec en blouse blanche qui normalement me donnera enfin la clé.

Abwarten und sehen*.



* "wait'n'see" a déjà trop été utilisé sur ce blog. Innovons.

mardi 6 septembre 2011

500 miles and 500 more.






Sometimes I'm hot and sometimes I'm cold,
Other times I feel like I'm getting old.
Social Distortion - Sometimes I Do





Souvent, je suis calme. Genre "Le lac" de Lamartine est true black metal à côté. Parce que peu de choses m'atteignent réellement. Parce que, on y revient toujours, quand tu vis avec une douleur constante, si quelque chose parvient à t'emmerder plus que ton système nerveux, c'est que c'est vraiment du lourd.

Il y a pourtant un aspect de la vie qui me fout hors de moi, à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit : les fautes de français. Grammaire, conjugaison, prononciation, usage, liaisons. Tout. Mais uniquement à la télé et particulièrement durant le journal télévisé. Où là, et oui c'est chiant, je corrige en direct. Au besoin je me lève et j'applaudis. Je ne dis pas qu'il n'y a pas de fautes dans mes écrits hein, ici ça doit pas mal pleuvoir. Mais curieusement, ça n'a rien à voir. Peut-être parce que pour plein d'autres sujets, l'empathie et la compréhension l'emportent, la bienséance et l'amour de son prochain prévalent.  Apparemment, le buste de présentateur cravaté est donc un peu un exutoire. Il ramasse pour tout ce qui se passe sous la surface du lac et qui ne transparaît pas, il paie pour tous les cons, les indifférents, les menteurs, les faux.
Certains klaxonnent en hurlant, d'autres bourrent dans les mollets avec un caddy de supermarché, d'autres encore tuent des gens dans des écoles. Donc finalement ça va.

dimanche 4 septembre 2011

Social Distortion - Born to Lose

 



I was brought in this world 1962,
I didn't have much choice you see.
But by the time I was eight,
I could tell it was too late,
I was already barking up the wrong tree.

When I was in school you thought I was a fool,
In trouble,
Breaking all the rules.
I was absent from class,
My daddy spanked my bare ass,
But I sure tried hard to be cool.


Born to lose, was what they said,
You know I was better off dead.
Born to lose, you're just bad news,
You don't get a second chance.


It was a hot summer night in mid July,
A hangover and a black eye.
Your momma said I was a loser,
A dead end cruiser,
And deep inside I know that she was right.


Born to lose, was what they said,
You know I was better off dead.
Born to lose, you're just bad news,
You don't get a second chance.


I tried to get myself a job
Because that's the way that
Things are, wanna have nice
Things and go far.

Well I'm sorry honey, 
I ain't got much money
But I can sure play this here old guitar.

As the years went on,
I made a few mistakes 
It was a troublebound 
For this young man. 

The police knockin' at my door, 
"Well he don't live here no more 
And he's playin' in a rock'n'roll band."


Born to lose, was what they said,
You know I was better off dead.
Born to lose, you're just bad news,
You don't get a second chance.



Sixteen tons.


*




She keeps Möet et Chandon, in her pretty cabinet
"Let them eat cake" she says, just like Marie Antoinette.
 Queen - Killer Queen




Quand ta santé commence à merder, tu es en droit de te dire qu'on va te ménager. Te chouchouter. Comme dans les séries américaines, où au moindre chien qui pisse sur un poteau, on vient t'amener un seau d'Haagen Dazs. Tu vas enfin pouvoir relâcher cette pression quotidienne de devoir tenir bon.
Sauf que. 
Sauf que vu que tu es perdu dans la nature avec un nouveau fardeau, pour peu que tu ne sois pas une énorme fleur très bleue, tu apprends à gérer. Et tu t'endurcis. Parce que la douleur ne fait pas uniquement travailler les muscles des mâchoires et des poings, c'eut été trop simple.

Quand les (pas "mes", c'est important) douleurs ont commencé, vers mes 15 ans, je marchais difficilement, restais souvent bloquée en me baissant et devais me faire habiller par ma mère chaque matin. Jamais, AU GRAND JAMAIS, je n'ai raté un jour d'école pour cette saloperie. Ici, tant que tu n'a pas un poumon qui pend par le nez, tu peux pas test. Donc, ça m'a appris à la fermer. Mais bien. Et à épargner les gens, ces créatures innocentes et en bonne santé, stressées à l'avance d'apprendre le nom du mal qui te ronge. Alors je les ai ménagés. Parce que je voyais bien la sale petite lumière qui clignotait dans leurs yeux si l'angoisse montait. Et j'ai menti. Je mens toujours, d'ailleurs.

"Et ça va?" "Mais ouiii"
"Et tes douleurs?" "C'est mieux pour le moment t'inquiète"
"Et tu as quoi?" "Bah rien de précis, à mon avis ce sont juste des douleurs articulaires"
Et tu vois, tu les ménages tellement, qu'à la fin, eux ne te ménagent plus. Tu es le roc à la con de la chanson de Nadiya, tu es le bon vieux sac dans lequel on peut puncher, vu que rien ne t'atteint. Tu es courageux de ne pas t'être auto-mis la tête sous l'oreiller, tu es un battant, bordel. Sauf que non, parce que tu pleures le soir, tes larmes formant des questions existentielles sur les draps. Et malgré tout, tu es rassuré de savoir que les autres ont désormais, grâce à tes mensonges, le cœur plus léger que le tien. 

Les mensonges passent, les années aussi.

Et un jour tu es par terre, et tu n'oses pas crier à quelqu'un de venir te relever...ou peut-être tout simplement parce que tu n'as même plus envie de le faire, si c'est pour devoir minimiser ton cri en recommençant à dédramatiser. 
Bref, je crois que je vais rester assise là encore quelques temps.


* à droite, Gopher de "La Croisière s'amuse"

samedi 3 septembre 2011

Vu que le sucre et moi ça fait 3,14, ça serait une super belle preuve d'abnégation de devenir un Choco Fresh. Une coque de chocolat croquante, un nuage de lait, une couche de crème à la noisette. Le comble du douçâtre et de l'écœurement glucidique. Peut-être pour essayer de boucher mes oreilles de l'intérieur, afin d'estomper cette putain d'alarme qui sonne à tout-va, ce souffle irrégulier, ces courbes qui s'effondrent pour repartir, mais en vain. Tout ça me donne envie d'aller manger du riz blanc en pleurant devant Forrest Gump. C'est bon de savoir que certaines choses sont toujours là.

mercredi 31 août 2011

The same old decent lazy eye.





Aujourd'hui, mec, je suis épuisée. Tellement épuisée que limite ça crée une nouvelle galaxie.

C'est flou. Ça tangue un peu mais sans décoiffer. Le rythme est juste très lent et très fatigant. Mes pulsations cardiaques dansent sur ma rétine, ma respiration ralentit et les acouphènes s'éveillent sournoisement en vrillant mes tympans. Et pourtant, les gens continuent. Comme si de rien n'était, vu qu'en effet, ce n'est pas grand-chose. C'est formidable. J'admire tellement cette nonchalance tout à fait naturelle et normale, l'aisance de ces gestes quotidiens désormais inaccessibles. Tout ça a l'air tellement lointain.

Le plus rigolo, ce sont les discussions. Les salaires, les biberons, les vacances. Et puis les concerts, les sorties, les balades. Après ça, en général j'essaie d'enchaîner directement, afin d'éviter le "et toi?".
Ça fait si longtemps que je vis ailleurs, les souvenirs s'effacent peu à peu. Quand les gens me parlent, j'essaie principalement de garder l'équilibre, de ne pas me tortiller sur ma chaise, de ne pas avoir un rictus de douleur, de ne pas trembler. Ce qui requiert pas mal d'énergie et de concentration. Et de penser très fort au jingle du "Monde sauvage d'Aywaille". Et parfois, il faut aussi beaucoup de contrôle de soi pour ne pas avoir envie de donner de petits coups de griffes sur le visage de son interlocuteur.

Tu le sais, je suis pour la paix dans le monde, à commencer par un rayon d'environ 10km autour de mon panier.
Mais très rarement, je suis, comme on le dit si joliment dans les pubs pour les médicaments anti-douleurs  menstruelles, "irritable" intérieurement. Du genre hautement abrasive, même.
Mais pour l'instant, j'ai toujours réussi à garder mon calme, à ne pas décharger toute cette mélodie stridente et compacte sur le premier venu (qui m'aura demandé comment j'ai réussi à ne pas encore me suicider, il y a des limites à la violence gratuite).


Je crois l'avoir déjà dit hein, mais je suis épuisée.


mardi 30 août 2011

Wake me up, before you go-go.







Vu que les vacances, c'est superfétatoire, j'écris. Pour combler. Pour calfeutrer. 

Alors les trucs que j'aime bien, le retour.

Pour commencer, les gens avec de bonnes mains bien solides. Pour plonger dans l'abîme, vois-tu. Sans hésiter, sans larmoyer, sans atermoyer. Sans avoir peur de s'en foutre jusque dans les gants. Un des nombreux trucs appris via la douleur, c'est le regard bien droit dans les yeux, les phrases qui claquent net, le chemin le plus bref pour toucher le cœur. Il n'y a rien de pire que des yeux qui fuient à l'approche d'une annonce grise ou noire. A ce moment-là, on ressent la gêne de l'autre, on balbutie, on se justifie et on aggrave. Pour finir par tout envoyer valser, du dos de la même main.
Et pour éventuellement balancer des claques à ma place, vu mes mains d'enfant pas fier. 


Sinon, les objets moches. Quand j'étais petite, je pensais que dès qu'on dormait, les objets s'animaient et avaient leur propre vie, peinards quoi. Sauf les moches. Qui étaient rejetés.* Du coup, je collectionnais les trucs pas beaux, convaincues que je les sauvais d'une fin atroce, vu que personne n'en voulait. Songer à une peluche informe aux couleurs douteuses, seule sur son rayonnage au Maxi Toys, parvenait à m'arracher des larmes de compassion. Aujourd'hui, j'ai un peu relativisé la chose, mais je continue à m'amouracher de t-shirts immondes, chaussures improbables et objets de décoration d'un goût plus qu'évidemment douteux. Avec toujours cette sensation d'avoir fait une bonne action, une fois poireautant dans la file à la caisse. C'est ce qui compte, on va dire. 
Cet axiome est également valable pour la musique : un mauvais clip, bien sûr, mais un synthé, une mauvaise boîte à rythme, une voix criarde... et mon cœur s'emballe, mes pupilles s'agrandissent de plaisir et ma bouche s'arrondit en un "C'est atroce", prononcé d'une voix à la fois teintée de respect et de consternation. Mais le rêve dans les yeux. Toujours.


Et enfin, les émissions de merde. J'aurais pu le mettre dans la catégorie d'avant, mais il y a piège ici. Car contrairement aux objets peu physiquement avantageux, les émissions de merde sont regardées et chéries par des millions de personnes. Pour ne pas les citer, "Confessions Intimes", feue "C'est mon choix", toutes les daubes de Delarue, "C'est quoi l'amour" et bien sûr "Pascal le grand frère" me font frémir. Le pire ou le mieux, c'est que grâce à ça j'ai énormément appris sur les affres de la nature humaine, les tréfonds de la psychologie comportementale à deux balles. Limite, quand une situation fâcheuse se présente, je retrouve dans ma tête un de ces épisodes, et hop, la clé.

Souvent je me demande pourquoi j'ai "fait l'unif" tsé. Surtout pour ne pas la terminer, j'imagine.



* peut-être déjà l'influence des séries américaines

dimanche 21 août 2011

Prends un coca et assieds-toi.

Depuis des années, je suis fan des "Carnets du bourlingueur". Il lui arrive toujours des merdes, et il s'en sort en général en mangeant des plantes et en badigeonnant sa tente de jus de citron vert.

Bref, le voyage, j'aime bien. Ailleurs est mieux, à partir du moment où il n'est pas ici. Enfin différent. Donc mieux, forcément.

Demain, mon cœur en forme d'île flottante et moi décollons pour les alpes slovènes pour théoriquement 10 jours. "Théoriquement", car ce voyage fleure autant l'organisation que moi la grâce. J'en ris déjà. Mais si tout se passe bien, nous serons quatre personnes inoffensives (bien que tout de noir vêtues par 30°), à gésir ici. A caresser les yaks angoras. A manger du pain et des trucs très gras, tout en buvant du vin local. Un rude programme, qui je l'espère effacera deux-trois images au passage.

S'il se passe des trucs intéressants, enfin non, fous et cons, ça se retrouvera ici en moins de deux. 
Sinon, on se dit à le 31.

mardi 16 août 2011

Hier, je crois, j'espère avoir bouclé la boucle, avoir fini un chapitre. 

Parce qu'en fait, quand je te voyais, je replongeais à chaque fois un peu dans le passé. Parfois un peu trop, même. Tu sais que je n'ai jamais été rancunière, mais on ne cicatrise pas toujours autant qu'on le voudrait. Donc on dira juste que ces dernières années étaient un peu salées.

Parce qu'en fait, là je ne t'en veux plus. Ta main qui tiédissait dans la mienne tout à l'heure paraissait tellement petite, que mes souvenirs et moi on s'est sentis bien cons tout d'un coup. On ne peut pas en vouloir à une si petite main, non.

Parce qu'en fait, le temps va encore passer, probablement. Et quand je repenserai en souriant à ta voix qui partait dans les aigus quand tu me grondais, mes yeux viseront le vague et plus l'amer.

Aujourd'hui j'ai l'impression d'avoir pris 10 ans et à la fois d'en avoir 10 à nouveau, quand tu me consolais pour rien en me disant qu'on irait chercher des violettes. Mon sternum est incrusté dans mon estomac, mes côtes s'entortillent dans mes poumons, mais je n'ai jamais pleuré avec autant de justesse. Cette fois-ci je sais que j'étais à ma place : pas de regrets, pas de "si", pas de "mais". L'apaisement. 

Dis-lui que son sale caractère nous manque.


lundi 15 août 2011

Keep away from Sue.





Aujourd'hui, pour une fois, on va parler des trucs que j'aime. Non parce qu'en général ici c'est assez sombre, appelons un pangolin un pangolin, donc on va y mettre un peu de couleur.
Nouvelle catégorie, donc, en trois points parce que ça fait toujours mieux.

Dans la vie, j'aime pas mal de choses.

Déjà, j'aime les objets en général. Dans mon lit deux personnes, il y a une personne qui est en fait des objets divers tels que vernis à ongles, sac à dos, Milk Puffs ou encore "Comprendre la télévision". J'aime bien. Comme ça je suis entourée, je peux me rouler en boule au milieu du bordel et ça me rassure.

Autre objet de mon affection: les mots fléchés. Depuis mes 12 ans environ j'attends avec impatience, chaque jeudi, que le programme-télé soit enfin disponible, pour aller noircir le poster central. Et faire des ratures au bic, ce que mon grand-père considérait comme la pire des vanités: il faut que tu crayonnes et que tu gommes, comme si tu étais vraiment humble. D'où probablement ce vieux rêve de devenir cover girl chez Sport Cérébral.

Et dernièrement, j'aime les années 90. Les années 80 ont lancé le mauvais goût, les épaulettes, les paillettes et les leggings pour aller avec le mullet, mais je ne sais pas. Les 90's ont apporté une dimension encore plus pathétique à la chose, car normalement quand on se taule comme on s'est taulés dans les 80's, on se reprend et, comme le disait si bien Alain Eraly de sa voix de velours*, s'appuyant sur son coude et un charisme débridé** le mardi matin : "l'homme est né pour tenter sans cesse de ne pas perdre la face". Sacré Alain. Les 90's ont clairement loupé le coche, elles ont gardé la décennie précédente mais au lieu de l'épurer, elles l'ont pimpée. Mauvais goût sur kitscherie sur rococo post-néo-moderne. Bref, quand je vois un clip totalement improbable, avec un chanteur engoncé dans une combi en latex, des danseuses peintes en doré, des cheveux de tous les côtés et surtout un synthé à faire peur même à José, je sais que je suis à la maison, en sécurité, dans les 90's.

* avant qu'il ne devienne CEO des gens en orange qui font des bals qui coûtent plus cher que le Janson
** fuck yeah zeugma!!

dimanche 14 août 2011

You need someone to take you there.

Mec, je me sens trop bien. La tête vide, la conscience tranquille. Le champagne dans les veines qui neutralise la douleur. Les yeux mi-clos, la bouche entrouverte, mais cette fois sans intervention d'autrui.
Je sais que la douleur va revenir. Mieux vaut le savoir. Mais je m'en contrefous. Compartimenter est une question d'entraînement, de larmes essuyées sur les manches de ton sweat H&M et de monologue interne. 

Parfois ça vaut le coup de toucher le fond pour mieux rebondir.

mardi 9 août 2011

Bombs over Gstaadt.

Et ben là, je donnerais facilement à peu près tout (sauf le chien), pour que quelqu'un m'appelle et me dise "Ryanair fait péter les places pas chères, on va où?". Avec l'obligation d'aller là où jamais on n'a posé un pied. Là où personne ne nous connait ou n'a nécessairement envie de. Mais on peut toujours les surprendre.
Puis sentir le décollage. Et se dire putain, ça va commencer à être loin d'ici.

Loin. Je t'aime tellement, Loin.

dimanche 31 juillet 2011

Open the brackets.

Bordel ce que j'aurais aimé être une note de bas de page. Histoire de passer inaperçue. Le truc qu'on ne voit pas, que personne ne lit, qui souvent prend de la place pour rien, mais qui parfois peut servir. A la demande quoi. En moins erratique que Belgacom TV, en moins sexuellement connoté que le room service. Donc oui je suis bien en train d'écrire mon mémoire, à ma surprise la plus générale.
Sinon j'aurais aimé être un bison aussi. Ou un yak. Un bel animal bien solide, planté sur ses nobles pattes au milieu de la pampa (j'aime bien "pampa" comme mot, et ça ne revient pas assez dans le discours publique), que personne ne vient faire chier avec des papiers de mutuelle par exemple. En plus je viens de vérifier sur Google, les bisons habitent bien dans la pampa, le bol. Il y a même un joli livre en allemand dessus. On est gâtés tsé.

mercredi 27 juillet 2011

Qu'il fut doux d'être enfant.






















Take time with a wounded hand, cause it likes to heal
Take time with a wounded hand, cause I like to steal.
 Stone Temple Pilots - Creep






La vie est parfois une grosse toupie multicolore, et me file de temps à autre la gerbe. Ce que j'ai en ligne de mire en écrivant ça: la perception qu'ont les autres de notre charmante personne.

Remontons le temps et arrêtons-nous à une bonne quinzaine d'années (en gros de mes 8 à 16 ans): j'étais alors, comme mes petits camarades me le scandaient régulièrement, grosse. J'avais également la tare d'être dans les premiers de classe, ce qui comme chacun sait est très mauvais: les défauts ne s'additionnent pas, ils se multiplient de manière exponentielle. J'avais donc l'outrecuidance d'être dotée d'une anatomie à géométrie variable et en plus je ne me faisais même pas oublier en étant cancre-moyenne. La lose, mec. Mais bon, comme je n'étais pas bien méchante et déjà bien conne sur le plan humain (bonne poire 4ever hein), les remarques pas du tout blessantes s'apparentaient généralement à "elle est gentille...mais dommage qu'elle soit grosse". Je n'ai jamais compris ce que l'un et l'autre de ces attributs faisaient dans la même phrase, mais soit. Le comportement à mon égard de mes camarades, ainsi que celui des instituteurs mais également des autres adultes, était souvent un brin hostile. J'ai mis des années à comprendre pourquoi, tout en ployant l'échine sous le poids de ces mots de plomb: le gros gosse, tu as envie de lui botter le cul. Pour qu'il maigrisse, déjà, parce que plus tard ça sera encore plus galère, mais aussi parce que tout ce gras, ça n'inspire que la paresse, la lenteur, la mollesse. Bref, tu as envie de lui gueuler "MAIS BOUGE-TOI". Et surtout tu utilises bien le mot "gros" à toutes les sauces, histoire que l'intéressé en ait une indigestion jusqu'au restant de ses jours.

Chemin faisant, j'ai perdu très soudainement une bonne partie de masse corporelle à l'adolescence. Et là, alors que j'attendais ça depuis des années, je n'ai pu m'empêcher d'observer le changement d'attitude des gens à mon égard. Les mecs, forcément, ont revu un peu leur jugement. Mais les adultes également. Finis les gestes d'impatience à la caisse quand tu ne trouves pas ta monnaie, les moqueries dans le bus quand tu passes devant les rangées latérales (oui celles du milieu, qui font un peu jury), les soupirs excédés quand tu ne marches pas assez vite dans la rue et j'en passe. Le choc. Et non, je n'exagère même pas, c'est ça le pire. J'ai mis du temps à me faire à cette nouvelle enveloppe, mon poids jouant gentiment au yoyo comme celui de pas mal de filles, mes complexes ont demeuré. 

Et récemment, j'ai vraiment perdu du poids. Cette fois-ci, on me dit que je suis maigre. Et là je rigole. Parce que ça m'en a bouffé du temps de mes 27 années, mais j'ai enfin compris. Ca n'ira jamais. Chacun voit ce qu'il a envie de voir, obéit à ses goûts, ses valeurs (parfois de merde, voir virgule précédente), ses envies. Pour ma part ça me plaît, sauf de me faire qualifier d'anorexique par un médecin, qui ignorait que juste avant de le voir, j'avais déjeuné de saucisson et de Schoko-bons (et sans me faire vomir après, HA).
Cependant soyons réalistes, j'ai compris mais pas pansé. Les remarques du passé ont laissé des griffes bien plus profondes sur ma carapace pas encore formée à l'époque, que celle d'aujourd'hui sur ma cuirasse (en carton certes, mais cuirasse quand même). Et il m'en reste encore des phobies, putain...


mardi 26 juillet 2011

Yes, we can't.





Avec lui je serai plus fort, il m'aidera dans les moments durs,
Avec lui je frimerai à mort, il m'aidera et guérira mes blessures.
Stupeflip - Ce petit blouson en daim




J'ai toujours bien aimé les pubs, le matraquage, la lobotomie commerciale. De la pub de bouffe pour chat qui fait "miau miau miau miau" à "tu me prêtes tes poils?" de Kiss Cool. Déjà quand j'étais un tout petit animal inoffensif, je contemplais les pubs Mattel et enviais ces petites filles au regard brillant, aux anglaises blondes si soyeuses et au coffre à jouets aussi empli que le mien mais en mieux, forcément. A chaque nouveauté annoncée, je partais à la chasse au Delhaize lors des courses hebdomadaires, me faisant piéger avec délice et consentement.
Alors une fois un peu grandie (point culminant : 1m64), je me suis tout naturellement tournée vers cette branche. De toute façon, astronaute j'aurais vomi dans la machine d'entraînement qui tourne, et ma condition physique de rêve m'empêchait de me laisser glisser en rond sur la rampe des pompiers. Bref, j'ai donc totalement par hasard fait un stage en relations publiques dans une belle agence de pub à Bruxelles, quand la crise ne menaçait pas, que tout le monde était jovial et insouciant et dilapidait l'argent de la dernière campagne (on préfère d'ailleurs dire business mais bon) dans des petits-déjeuners et brunchs pantagruéliques. J'aimais bien cette ambiance au départ, tout le monde se tutoyait, le mec du studio avait des tatouages partout, on m'envoyait acheter des cadeaux pour les clients, à qui d'ailleurs j'écrivais des cartes d'anniversaire.
Et puis mon stage en tant que copywriter a commencé. Mon art director s'appelait aussi Johanna, mais nous n'étions clairement pas du même monde. En gros, durant un mois, nous n'avons jamais trouvé de point d'équilibre et avons fini par nous nier royalement la gueule, ça valait mieux. Cette situation m'a quelque peu paniquée et m'a fait prendre conscience de la chose suivante : ton AD, c'est ton concubin +++. Parce qu'on passe des heeeeures ensemble à pinailler sur des détails refusés par le client, qu'on part en voyage à deux à Cuba vu qu'un tournage là-bas coûte moins cher qu'en Espagne, etc. Et vu qu'en mecs et en relations je n'étais déjà pas très douée, j'ai préféré reprendre des études, faire un master en commu pour aboutir à je ne sais pas trop quoi comme profession au final, mais pas publicitaire. Ce qui est d'ailleurs très con parce que je me rends compte aujourd'hui que c'est peut-être la seule voie qui s'ouvre à moi. Mais soit.

Tout ça pour dire que je n'avais pas de regrets. Jusqu'au jour où j'ai entendu ces mots magiques: "C'est peut-être à cause du chien qui regarde... Problème d'érection? N'hésitez pas à en parler". 

Merci au service public qui a le don d'exiger et de valider les plus belles campagnes.


lundi 25 juillet 2011

Lettre ouverte à Google +.




Cher Google +,


                    Avant même que tu ne naisses, j'étais déjà une fervente adepte de tes parents. Les invitations Gmail avaient à l'époque excité ma convoitise au plus haut point, et quand Blogger a jailli des limbes de Google, je m'y suis précipitée, séduite par ce fallacieux et démagogique argument de log-in: "cessons de délocaliser". De changer de nom d'utilisateur et de mot de passe pour chaque site, de devoir répéter cette si épuisante rengaine qu'est "déconnecter - bonjour, êtes-vous déjà inscrit? oui-non". En fait, ça donne un peu l'impression d'être bien au chaud à s'baraque, chaque petit animal dans son panier, tout est bien rangé. C'était rassurant, ça me donnait le sentiment d'être entourée, d'appartenir, plus qu'à une entité, à communauté, avec son identité propre. Même si la démarche s'est arrêtée à mon salon hein. C'était un peu le mondialisme mais en moins éthiquement dérangeant, car pour l'instant on ne délocalise pas le tissage des flux de kilooctets dans des usines asiatiques. Aujourd'hui, on a encore plus sentiment d'appartenir à une tribu : si l'un des outils plante (par exemple Gmail), pas de problème, maintenant on se chope sur toi, Google +. Tu nous proposes en fait un concept totalement inédit, si on n'est pas trop regardants: un avatar, une section infos et une section photos. Et bien sûr, DM (direct message pour faire la twittos), live chat (d'ailleurs, Google +, tu as tellement fait de mal à Mark qu'il a décidé de bousiller celui de Facebook) et autres petites gâteries 3.0. telles la visioconférence et le si exotique "like".
Ne mentons pas, j'ai aimé cette symbiose, cette harmonie des outils communicationnels. Comme un mode de vie et pas comme une mode tout court. Pas comme on a aimé les Buffalos en 99 pour se rendre compte des années plus tard qu'on aurait mieux fait de rester aux Palladiums. Non. C'est  bien un mode de vie pour moi, car je crois en la communication multifonctionnelle, multidirectionnelle et d'autres mots en poly- qui font bien (et en la licorne rose invisible aussi mais ça c'est autre chose).

Le revers de toutes ces paillettes est ma foi le plus simple et évident des vices de l'interdépendance : une trop grande interdépendance. Faisant fi de cet adage par trop poussiéreux, docilement, j'ai donc uploadé sur toi un album regroupant les photos de mon blog. Fort bien me dis-je, mais il y en a quelques-unes (beaucoup) que bof. Je m'empressai donc de les effacer, et quelle ne fut pas ma surprise, à l'ouverture de mon blog, de constater que ces images ne se sont pas contentées de s'éclipser de cet album, mais également de mon blog. Dans la mesure où il s'agit de ma 6e année de bloggage, et donc d'entassage de photos, je crois que tu peux, cher Google +, comprendre mon désarroi et mon envie de dire "fffFFFFuuuUUU".
Et pourtant je ne t'en veux pas.
Je saisis ta logique d'interconnexion, tu vois. Mais, comme avec le minitel, l'EyeToy ou le ping pong à jouer sur sa télé dans les 70's : l'humanité n'est pas prête. Alors s'il te plaît, ne nous fais pas prononcer cette sentence de hipster blasé "c'est bien mais ça sert à rien",  car on sait tous que tu peux faire mieux que ça. Et n'oublie pas que même si je suis restée polie, il y en a quelques-uns qui se foutent déjà bien de toi

En espérant que tu ne nous oublieras pas, nous, les utilisateurs lambdas.

Johanna